Tourisme en Outre-mer : après l’urgence sanitaire, l’urgence économique
Face aux sénateurs, les différents représentants du secteur touristique dans les territoires d’Outre-mer ont fait part jeudi de leurs difficultés depuis le début de la crise sanitaire. Et attendent l’aide de l’État pour réussir à y faire face.
La Délégation sénatoriale aux Outre-mer organisait jeudi 25 juin une table ronde sur le tourisme, dans le cadre d’une étude sur l’urgence économique dans ces territoires à la suite de la crise liée au Covid-19. L’occasion de faire un point avec les représentants de chacun d’entre-eux sur la situation actuelle et sur leurs attentes pour les mois à venir.
Et pour certains, jusqu’à présent peu touchés par la crise sanitaire, c’est l’économie du territoire qui se voit lourdement impactée, le tourisme représentant bien souvent une très grande partie, si ce n’est la totalité, de leurs revenus. « Nous avons déjà enregistré une perte de 100 millions d’euros sur les trois derniers mois. C’est une estimation à date, qui sera a priori beaucoup plus importante sur la fin de l’année », a fait savoir aux sénateurs François Baltus-Languedoc, directeur général du Comité martiniquais du tourisme.
Même constat en Polynésie française, avec une perte d’environ 333 millions d’euros estimée en 2020, ou en Guadeloupe, où le « chiffre d’affaires est proche de zéro » depuis le mois de mars, selon Nicolas Vion, président du Groupement hôtelier et touristique de la Guadeloupe (GHTG). « Cette crise porte un notable coup d’arrêt à la dynamique touristique », a également commenté Michel Madi, directeur du comité du tourisme de Mayotte.
Des situations propres à chaque territoire
Si les situations sont différentes selon les territoires, tous pointent les difficultés liées à la reprise, trop progressive, de l’aérien. Les mesures de sécurité drastiques sont également au coeur du problème, même si elles ne font pas l’unanimité. Stéphane Artano, sénateur de Saint-Pierre-et-Miquelon, se dit plutôt favorable au maintien d’une septaine pour les voyageurs, tandis que La Réunion, par la voix de sa sénatrice Nassimah Dindar, espère au contraire voir le dispositif disparaître une fois l’état d’urgence levé. L’amendement du 17 juin dernier sur la prolongation de l’état d’urgence pourrait en effet compliquer les choses. « Les acteurs touristiques estiment que cette décision pourrait entraîner des conséquences encore plus désastreuses que celles que nous connaissons aujourd’hui », ajoute le directeur du comité du tourisme de Mayotte.
L’arrêt des activités a donc poussé de nombreuses entreprises du secteur à faire appel aux différentes aides proposées par l’État, dont le fonds de solidarité. Beaucoup ont toutefois rencontré des difficultés pour obtenir le « Prêt garanti par l’État » (PGE), les banques ne jouant pas toujours le jeu, selon les représentants du tourisme en Outre-mer. Toujours à l’arrêt, et avec « peu de chance que le tourisme international reprenne avant octobre, beaucoup ne vont pas pouvoir résister sans des aides massives », estime Julie Laronde, directrice générale chez Nouvelle-Calédonie Tourisme.
L’Etat appelé à l’aide
Pour tenter de répondre à tous ces problèmes, le Premier ministre a chargé le député LREM du Val d’Oise, Guillaume Vuilletet, d’une mission sur « la place des Outre-mer » et « les moyens de les accompagner » après la pandémie de Covid-19, selon un décret paru jeudi au Journal officiel. Il devra ainsi établir « un diagnostic sur les conséquence de la pandémie sur l’insertion régionale des Outre-mer » et faire, d’ici le 15 novembre, des recommandations sur « les moyens juridiques, financiers et opérationnels les plus adaptés pour permettre aux Outre-mer de poursuivre leur insertion régionale, et au plan national, de renforcer la résilience de la continuité territoriale ».
En attendant, chaque territoire s’active également pour lancer un plan de relance afin de faire revenir les touristes. Ce qui pourra prendre du temps, de nombreux voyageurs étant toujours inquiets quant à la propagation du virus. « Il faut faire attention à la contagion émotionnelle », estime Patrick Serveaux, président de l’UMIH et de la commission tourisme du MEDEF Réunion. Ce dernier appelle aussi à « faire attention à la deuxième vague économique et à la troisième vague qui pourrait être sociale ».
Pour cela, les professionnels du secteur appellent notamment l’État à accompagner les entreprises pour repartir. Ce qui pourra passer par des campagnes de communication beaucoup plus ambitieuses, une information claire pour rassurer la clientèle sur les conditions sanitaires, ou encore un travail pour aller chercher de nouveaux marchés.
Auteur
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Brice Lahaye
Source : Tourisme en Outre-mer : après l’urgence sanitaire, l’urgence économique
Étiquettes : Coronavirus, Outre-mer
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